Privatisations des armées de l'OTANIE.
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Privatisations des armées de l'OTANIE.
https://web.archive.org/web/20170307103426/http://lebilan.fr/2015/09/08/defense-linquietante-privatisation-de-larmee-est-amorcee/
Parmi les domaines régaliens de toute nation se trouve la défense militaire ; même les tenants du plus pur libéralisme économique ne remettent pas en cause la sphère d’influence de l’État en la matière. Pourtant, comme tout service devenant une marchandise sur le grand marché capitaliste, la protection armée fait l’objet d’une privatisation progressive à mesure que les budgets publics se restreignent. Le phénomène est déjà bien avancé et nourrit de profondes interrogations sur le devenir des armées, en France particulièrement.
La défense nationale est-elle une marchandise comme une autre ? Sans aucun doute pour les propriétaires d’entreprises de protection, qui escomptent bien gagner de juteux profits sur les opérations qui leur sont confiées. Sur le modèle des États-Unis, l’armée française recourt depuis quelques années à des firmes privées pour réaliser les missions qu’elle devient incapable d’assumer seule. Les faits sont inquiétants, car ils révèlent un processus récent de privatisation que nul ne sait où il mènera finalement ; tandis que la France est toujours engagée sur trois fronts, au Mali, en Centrafrique et en Irak.
Blakwater, première grande société militaire privée, a été créée en 1997 et a fait le fortune de son fondateur, Erik Prince, ancien des forces spéciales de l’US Navy. Elle acquiert rapidement la sous-traitance de stages de formation pour l’armée étasunienne pour des domaines d’intervention ciblé, tel que le milieu scolaire après la fusillade du lycée de Colombine en 1999. Après les attentats du 11 septembre 2001, elle sera sollicitée pour des opérations de terrain dans les zones de guerre, en soutien aux GI’s ou à la CIA, en Afghanistan et en Irak notamment. En 2004, Blackwater obtient – sans appel d’offres – le contrat Worldwide Personal Protective Service (WPPS) pour assurer la protecction à travers le globe de ressortissants américains et de responsables étrangers proches de Washington ; elle recevra 4888 millions de dollars en deux ans au titre de cette mission. Le 8 mai 2006, le département d’Etat américain passe le contrat WPPSII avec Blackwater et deux autres sociétés, DynCorp et Triple Canopy, pour une somme atteignant cette fois un total de 3,6 milliards de dollars. Le chiffre d’affaires de la firme augmente ainsi de 80.000% entre 2001 et 2006 ([url=Blakwater, premi%C3%A8re grande soci%C3%A9t%C3%A9 militaire priv%C3%A9e, a %C3%A9t%C3%A9 cr%C3%A9%C3%A9e en 1997 et a fait le fortune de son fondateur, Erik Prince, ancien des forces sp%C3%A9ciales de l%E2%80%99US Navy. Elle acquiert rapidement la sous-traitance de stages de formation pour l%E2%80%99arm%C3%A9e %C3%A9tasunienne pour des domaines d%E2%80%99intervention cibl%C3%A9, tel que le milieu scolaire apr%C3%A8s la fusillade du lyc%C3%A9e de Colombine en 1999. Apr%C3%A8s les attentats du 11 septembre 2001, elle sera sollicit%C3%A9e pour des op%C3%A9rations de terrain dans les zones de guerre, en soutien aux GI%E2%80%99s ou %C3%A0 la CIA, en Afghanistan et en Irak notamment. En 2004, Blackwater obtient %E2%80%93 sans appel d%E2%80%99offres %E2%80%93 le contrat Worldwide Personal Protective Service (WPPS) pour assurer la protecction %C3%A0 travers le globe de ressortissants am%C3%A9ricains et de responsables %C3%A9trangers proches de Washington ; elle recevra 4888 millions de dollars en deux ans au titre de cette mission. Le 8 mai 2006, le d%C3%A9partement d%E2%80%99Etat am%C3%A9ricain passe le contrat WPPSII avec Blackwater et deux autres soci%C3%A9t%C3%A9s, DynCorp et Triple Canopy, pour une somme atteignant cette fois un total de 3,6 milliards de dollars. Le chiffre d%E2%80%99affaires de la firme augmente ainsi de 80.000% entre 2001 et 2006 (]1[/url]).
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La responsabilité de Blackwater dans une tuerie, le 16 septembre 2007, sur la place Nissour de Bagdad qui a coûté la vie à dix-sept civils irakiens (2), n’entamera pas l’appétit de la société militaire. Elle fait néanmoins l’objet d’un lifting de façade, devenant Xe en février 2009 et, plus élégamment, Academi en décembre 2011. Une longue série d’exactions, décrites en particulier dans le livre du reporter américain Jeremy Scahill, L’ascension de l’armée privée la plus puissante du monde, n’empêche pas l’entreprise de prospérer sur tous les conflit où les intérêts étasuniens sont engagés. En 2010, Xe passe un nouveau contrat avec la CIA pour protéger les consulats américains en Afghanistan. Academi continue d’officier en Irak et en Syrie, officiellement pour combattre l’État islamique, tandis qu’elle prend part à la guerre civile ukrainienne depuis 2013 à travers sa filiale Greystone Limited, sous l’égide des services secrets américains et du gouvernement putschiste de Kiev. Intervenant sur de vastes zones de guerre, Academi reste la plus importante société militaire privée et un modèle que des puissance financières cherchent à décliner partout dans le monde.
En France, la privatisation s’amorce par des moyens plus sinueux. Le « Balardgone », nom du nouveau siège de la Défense livré en 2015, est l’oeuvre de Bouygues Énergies & Services – une filiale du puisant groupe mondial de bâtiments et travaux publics. L’ensemble est composé de 330.000 mètres carrés, plus de 3.000 bureaux, 150 salles de réunion et 108 ascenseurs pour desservir les sept niveaux (3). Le « Pentagone français », surnom du bâtiment, fait l’objet d’un contrat de 3,5 milliards d’euros, en partie financé par des firmes privées, tandis que plusieurs irrégularités ont été observées. Le Canard enchaîné n’hésite pas à parler de « Balardgate », en signe de scandale financier, en relevant plusieurs faits compromettants – tels que l’obligation de passer par Bouygues pour le moindre changement, facturé plusieurs centaines d’euros pour la pose d’une nouvelle prise d’électricité par exemple. Le Balardgone reste la propriété de Bouygues pour trois décennies, tandis que l’Etat français s’acquitte d’un loyer annuel de 154 millions d’euros sur les 27 années à venir. En outre, la sélection de Bouygues, qui concurrençait notamment Eiffage et Vinci, aurait fait l’objet de corruption et de favoritisme (4) entre le lancement de l’appel d’offres en 2009 et l’acquisition du projet en 2011.
En raison de la baisse budgétaire à laquelle fait face la Défense, le recours à des entreprises privées devient monnaie courante pour réduire les coûts à court terme. Le ministre français Jean-Yves Le Drian a déjà annoncé que le matériel militaire destiné aux armées fera l’objet d’une privatisation : des « sociétés de projets », sur le modèle américain du « leasing », verront le jour cette année 2015, acquerront l’arsenal militaire et le sous-loueront aux armées régulières. C’est une étape supplémentaire dans la privatisation de l’équipement, qui fait l’objet depuis des années d’un marché parallèle sur lequel les soldats se procurent d’ores et déjà le matériel qui leur manque – sacs, gourdes et autres objets de l’attirail nécessaire en zone de conflit. En 2015, sur les 31,4 milliards d’euros de budget de la Défense, 2,3 milliards devront provenir de la vente d’équipements militaires et d’actifs immobiliers (5) ; cette somme est vouée à augmenter irrémédiablement dans les années à venir. L’équipement et l’arsenal militaire français deviendra donc la propriété d’obscures sociétés privées, auxquelles l’armée régulière se verra contrainte de louer son matériel pour réaliser ses opérations.
Dans l’hexagone, plusieurs sociétés militaires privées s’organisent depuis quatre ans pour faire changer la loi (6), et rendre possible la déclinaison française du business initié par Blackwater. Dès 2014, elles ont obtenu gain de cause avec l’annonce, par les ministères de l’écologie et des transports, du recours prochain à des « entreprises privées de protection des navires », en particulier les navires commerciaux qui peinent à traverser la Corne de l’Afrique sans se faire attaquer par des bateaux pirates (7). Gilles Sacaze, ancien de la DGSE et fondateur de Gallice Security, y voyait déjà « un signe très positif, parce qu’il montre la fin d’un dogme ». Le projet de loi a depuis été voté par l’Assemblée nationale dans la plus complète discrétion (8), et permet donc aux firmes de protection privées d’assurer des missions jusqu’alors dévolues aux armées françaises. Si le périmètre d’action est, pour le moment, réduit, il tendra irrémédiablement à s’élargir toujours plus, à mesure que la défense française ne pourra assurer ses missions avec ses seules ressources publiques.
De la privatisation progressive découle deux phénomènes distincts et tous deux inquiétants. D’abord, des sociétés privées mues par la promesse de profits font leur business ouvertement avec les armées régulières, ce qui signifie qu’une plus-value est désormais opérée sur la défense de la nation – et pas des moindres si l’on tient compte du chiffres d’affaires exponentiel des entreprises concernées. Les dépenses militaires composant l’un des tous premiers postes budgétaires de la nation, ce sont in fine les contribuables français qui paieront une facture plus élevée en raison des bénéfices ponctionné par les sociétés militaires privées ; en creux, il est important de constater qu’il sera toujours plus difficile pour les armées françaises, comme étasuniennes, d’opérer sans le concours des entreprises privées, devenues incontournables pour les opérations de grande envergure.
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Secundo, l’armée est désormais un service marchand qui peut être acheté par les grandes fortunes pour protéger leurs intérêts. Si la collusion entre l’Etat et la haute bourgeoisie ne date pas d’hier, si bien que la plupart des interventions de l’armée visent d’ores et déjà à maintenir l’ordre capitaliste dans des zones intéressantes pour leurs ressources, les détenteurs de gros capitaux peuvent désormais s’affranchir des armées régulières en s’offrant les services d’une armée privée. Les mercenaires sont prêts à tout pour satisfaire les besoins de leurs clients, y compris écraser les révoltes ouvrières ou néocoloniales s’il le faut. L’armée privée sera toujours aux ordres de la grande bourgeoisie, et constituera son ultime rempart face au soulèvement populaire qu’un système économique profondément inégalitaire et inefficient finira par provoquer. L’argent sera, plus que jamais, le nerf de la guerre.
Avec le processus, lent mais certain, de privatisation de la défense nationale, les puissances de l’argent sont doublement gagnantes. Non seulement elles ponctionnent, à travers leurs sociétés privées, une plus-value sur les opérations militaires engagées aux quatre coins du monde ; et elles disposent désormais d’une armée de mercenaires qui ne leur fera jamais défaut, même en cas de révolte populaire ou de conflit social majeur. Les travailleurs sont donc doublement perdants, en tant que contribuables et en tant que classe sociale aux intérêts antagonistes à ceux de la haute bourgeoisie dominante. Plus encore que d’une époque, la privatisation de l’armée est le signe d’une hégémonie totale de la caste capitaliste, qui tire plus que jamais les ficelles des conflits pour mieux régner, fut-ce sur un tas de cendres.
Références
1 : http://oversight.house.gov/documents/20071001121609.pdf
2 : http://www.letemps.ch/template/international.asp?page=4&article=216233
3 : http://www.lesechos.fr/industrie-services/air-defense/021204505014-visite-au-coeur-du-pentagone-francais-1136871.php
4 : http://www.rfi.fr/france/20150711-pentagone-francais-chef-service-bouygues-mis-examen-ministere-defense
5 : http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2014/10/03/20002-20141003ARTFIG00038-les-armees-francaises-vont-recourir-a-la-location.php
6 : http://www.lemonde.fr/international/article/2013/05/29/les-societes-militaires-privees-francaises-veulent-operer-plus-librement_3420080_3210.html
7 : http://www.slate.fr/story/82641/pirates-soldats-prives
8 : http://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPubliee.do;jsessionid=FE9CCC3BB8B2C4E125EF3CB9A95C26DC.tpdjo04v_3?idDocument=JORFDOLE000028429421&type=general&legislature=14
Parmi les domaines régaliens de toute nation se trouve la défense militaire ; même les tenants du plus pur libéralisme économique ne remettent pas en cause la sphère d’influence de l’État en la matière. Pourtant, comme tout service devenant une marchandise sur le grand marché capitaliste, la protection armée fait l’objet d’une privatisation progressive à mesure que les budgets publics se restreignent. Le phénomène est déjà bien avancé et nourrit de profondes interrogations sur le devenir des armées, en France particulièrement.
La défense nationale est-elle une marchandise comme une autre ? Sans aucun doute pour les propriétaires d’entreprises de protection, qui escomptent bien gagner de juteux profits sur les opérations qui leur sont confiées. Sur le modèle des États-Unis, l’armée française recourt depuis quelques années à des firmes privées pour réaliser les missions qu’elle devient incapable d’assumer seule. Les faits sont inquiétants, car ils révèlent un processus récent de privatisation que nul ne sait où il mènera finalement ; tandis que la France est toujours engagée sur trois fronts, au Mali, en Centrafrique et en Irak.
L’archétype Blackwater
Blakwater, première grande société militaire privée, a été créée en 1997 et a fait le fortune de son fondateur, Erik Prince, ancien des forces spéciales de l’US Navy. Elle acquiert rapidement la sous-traitance de stages de formation pour l’armée étasunienne pour des domaines d’intervention ciblé, tel que le milieu scolaire après la fusillade du lycée de Colombine en 1999. Après les attentats du 11 septembre 2001, elle sera sollicitée pour des opérations de terrain dans les zones de guerre, en soutien aux GI’s ou à la CIA, en Afghanistan et en Irak notamment. En 2004, Blackwater obtient – sans appel d’offres – le contrat Worldwide Personal Protective Service (WPPS) pour assurer la protecction à travers le globe de ressortissants américains et de responsables étrangers proches de Washington ; elle recevra 4888 millions de dollars en deux ans au titre de cette mission. Le 8 mai 2006, le département d’Etat américain passe le contrat WPPSII avec Blackwater et deux autres sociétés, DynCorp et Triple Canopy, pour une somme atteignant cette fois un total de 3,6 milliards de dollars. Le chiffre d’affaires de la firme augmente ainsi de 80.000% entre 2001 et 2006 ([url=Blakwater, premi%C3%A8re grande soci%C3%A9t%C3%A9 militaire priv%C3%A9e, a %C3%A9t%C3%A9 cr%C3%A9%C3%A9e en 1997 et a fait le fortune de son fondateur, Erik Prince, ancien des forces sp%C3%A9ciales de l%E2%80%99US Navy. Elle acquiert rapidement la sous-traitance de stages de formation pour l%E2%80%99arm%C3%A9e %C3%A9tasunienne pour des domaines d%E2%80%99intervention cibl%C3%A9, tel que le milieu scolaire apr%C3%A8s la fusillade du lyc%C3%A9e de Colombine en 1999. Apr%C3%A8s les attentats du 11 septembre 2001, elle sera sollicit%C3%A9e pour des op%C3%A9rations de terrain dans les zones de guerre, en soutien aux GI%E2%80%99s ou %C3%A0 la CIA, en Afghanistan et en Irak notamment. En 2004, Blackwater obtient %E2%80%93 sans appel d%E2%80%99offres %E2%80%93 le contrat Worldwide Personal Protective Service (WPPS) pour assurer la protecction %C3%A0 travers le globe de ressortissants am%C3%A9ricains et de responsables %C3%A9trangers proches de Washington ; elle recevra 4888 millions de dollars en deux ans au titre de cette mission. Le 8 mai 2006, le d%C3%A9partement d%E2%80%99Etat am%C3%A9ricain passe le contrat WPPSII avec Blackwater et deux autres soci%C3%A9t%C3%A9s, DynCorp et Triple Canopy, pour une somme atteignant cette fois un total de 3,6 milliards de dollars. Le chiffre d%E2%80%99affaires de la firme augmente ainsi de 80.000% entre 2001 et 2006 (]1[/url]).
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La responsabilité de Blackwater dans une tuerie, le 16 septembre 2007, sur la place Nissour de Bagdad qui a coûté la vie à dix-sept civils irakiens (2), n’entamera pas l’appétit de la société militaire. Elle fait néanmoins l’objet d’un lifting de façade, devenant Xe en février 2009 et, plus élégamment, Academi en décembre 2011. Une longue série d’exactions, décrites en particulier dans le livre du reporter américain Jeremy Scahill, L’ascension de l’armée privée la plus puissante du monde, n’empêche pas l’entreprise de prospérer sur tous les conflit où les intérêts étasuniens sont engagés. En 2010, Xe passe un nouveau contrat avec la CIA pour protéger les consulats américains en Afghanistan. Academi continue d’officier en Irak et en Syrie, officiellement pour combattre l’État islamique, tandis qu’elle prend part à la guerre civile ukrainienne depuis 2013 à travers sa filiale Greystone Limited, sous l’égide des services secrets américains et du gouvernement putschiste de Kiev. Intervenant sur de vastes zones de guerre, Academi reste la plus importante société militaire privée et un modèle que des puissance financières cherchent à décliner partout dans le monde.
Le « Balardgate » français
En France, la privatisation s’amorce par des moyens plus sinueux. Le « Balardgone », nom du nouveau siège de la Défense livré en 2015, est l’oeuvre de Bouygues Énergies & Services – une filiale du puisant groupe mondial de bâtiments et travaux publics. L’ensemble est composé de 330.000 mètres carrés, plus de 3.000 bureaux, 150 salles de réunion et 108 ascenseurs pour desservir les sept niveaux (3). Le « Pentagone français », surnom du bâtiment, fait l’objet d’un contrat de 3,5 milliards d’euros, en partie financé par des firmes privées, tandis que plusieurs irrégularités ont été observées. Le Canard enchaîné n’hésite pas à parler de « Balardgate », en signe de scandale financier, en relevant plusieurs faits compromettants – tels que l’obligation de passer par Bouygues pour le moindre changement, facturé plusieurs centaines d’euros pour la pose d’une nouvelle prise d’électricité par exemple. Le Balardgone reste la propriété de Bouygues pour trois décennies, tandis que l’Etat français s’acquitte d’un loyer annuel de 154 millions d’euros sur les 27 années à venir. En outre, la sélection de Bouygues, qui concurrençait notamment Eiffage et Vinci, aurait fait l’objet de corruption et de favoritisme (4) entre le lancement de l’appel d’offres en 2009 et l’acquisition du projet en 2011.
Les « sociétés de projet » et la « protection des navires »
En raison de la baisse budgétaire à laquelle fait face la Défense, le recours à des entreprises privées devient monnaie courante pour réduire les coûts à court terme. Le ministre français Jean-Yves Le Drian a déjà annoncé que le matériel militaire destiné aux armées fera l’objet d’une privatisation : des « sociétés de projets », sur le modèle américain du « leasing », verront le jour cette année 2015, acquerront l’arsenal militaire et le sous-loueront aux armées régulières. C’est une étape supplémentaire dans la privatisation de l’équipement, qui fait l’objet depuis des années d’un marché parallèle sur lequel les soldats se procurent d’ores et déjà le matériel qui leur manque – sacs, gourdes et autres objets de l’attirail nécessaire en zone de conflit. En 2015, sur les 31,4 milliards d’euros de budget de la Défense, 2,3 milliards devront provenir de la vente d’équipements militaires et d’actifs immobiliers (5) ; cette somme est vouée à augmenter irrémédiablement dans les années à venir. L’équipement et l’arsenal militaire français deviendra donc la propriété d’obscures sociétés privées, auxquelles l’armée régulière se verra contrainte de louer son matériel pour réaliser ses opérations.
Dans l’hexagone, plusieurs sociétés militaires privées s’organisent depuis quatre ans pour faire changer la loi (6), et rendre possible la déclinaison française du business initié par Blackwater. Dès 2014, elles ont obtenu gain de cause avec l’annonce, par les ministères de l’écologie et des transports, du recours prochain à des « entreprises privées de protection des navires », en particulier les navires commerciaux qui peinent à traverser la Corne de l’Afrique sans se faire attaquer par des bateaux pirates (7). Gilles Sacaze, ancien de la DGSE et fondateur de Gallice Security, y voyait déjà « un signe très positif, parce qu’il montre la fin d’un dogme ». Le projet de loi a depuis été voté par l’Assemblée nationale dans la plus complète discrétion (8), et permet donc aux firmes de protection privées d’assurer des missions jusqu’alors dévolues aux armées françaises. Si le périmètre d’action est, pour le moment, réduit, il tendra irrémédiablement à s’élargir toujours plus, à mesure que la défense française ne pourra assurer ses missions avec ses seules ressources publiques.
Deux phénomènes distincts
De la privatisation progressive découle deux phénomènes distincts et tous deux inquiétants. D’abord, des sociétés privées mues par la promesse de profits font leur business ouvertement avec les armées régulières, ce qui signifie qu’une plus-value est désormais opérée sur la défense de la nation – et pas des moindres si l’on tient compte du chiffres d’affaires exponentiel des entreprises concernées. Les dépenses militaires composant l’un des tous premiers postes budgétaires de la nation, ce sont in fine les contribuables français qui paieront une facture plus élevée en raison des bénéfices ponctionné par les sociétés militaires privées ; en creux, il est important de constater qu’il sera toujours plus difficile pour les armées françaises, comme étasuniennes, d’opérer sans le concours des entreprises privées, devenues incontournables pour les opérations de grande envergure.
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Secundo, l’armée est désormais un service marchand qui peut être acheté par les grandes fortunes pour protéger leurs intérêts. Si la collusion entre l’Etat et la haute bourgeoisie ne date pas d’hier, si bien que la plupart des interventions de l’armée visent d’ores et déjà à maintenir l’ordre capitaliste dans des zones intéressantes pour leurs ressources, les détenteurs de gros capitaux peuvent désormais s’affranchir des armées régulières en s’offrant les services d’une armée privée. Les mercenaires sont prêts à tout pour satisfaire les besoins de leurs clients, y compris écraser les révoltes ouvrières ou néocoloniales s’il le faut. L’armée privée sera toujours aux ordres de la grande bourgeoisie, et constituera son ultime rempart face au soulèvement populaire qu’un système économique profondément inégalitaire et inefficient finira par provoquer. L’argent sera, plus que jamais, le nerf de la guerre.
Avec le processus, lent mais certain, de privatisation de la défense nationale, les puissances de l’argent sont doublement gagnantes. Non seulement elles ponctionnent, à travers leurs sociétés privées, une plus-value sur les opérations militaires engagées aux quatre coins du monde ; et elles disposent désormais d’une armée de mercenaires qui ne leur fera jamais défaut, même en cas de révolte populaire ou de conflit social majeur. Les travailleurs sont donc doublement perdants, en tant que contribuables et en tant que classe sociale aux intérêts antagonistes à ceux de la haute bourgeoisie dominante. Plus encore que d’une époque, la privatisation de l’armée est le signe d’une hégémonie totale de la caste capitaliste, qui tire plus que jamais les ficelles des conflits pour mieux régner, fut-ce sur un tas de cendres.
Références
1 : http://oversight.house.gov/documents/20071001121609.pdf
2 : http://www.letemps.ch/template/international.asp?page=4&article=216233
3 : http://www.lesechos.fr/industrie-services/air-defense/021204505014-visite-au-coeur-du-pentagone-francais-1136871.php
4 : http://www.rfi.fr/france/20150711-pentagone-francais-chef-service-bouygues-mis-examen-ministere-defense
5 : http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2014/10/03/20002-20141003ARTFIG00038-les-armees-francaises-vont-recourir-a-la-location.php
6 : http://www.lemonde.fr/international/article/2013/05/29/les-societes-militaires-privees-francaises-veulent-operer-plus-librement_3420080_3210.html
7 : http://www.slate.fr/story/82641/pirates-soldats-prives
8 : http://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPubliee.do;jsessionid=FE9CCC3BB8B2C4E125EF3CB9A95C26DC.tpdjo04v_3?idDocument=JORFDOLE000028429421&type=general&legislature=14
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Re: Privatisations des armées de l'OTANIE.
Les syndicats militaires belges inquiets de la privatisations des armées.
https://www.dhnet.be/actu/belgique/les-syndicats-militaires-inquiets-de-la-privatisation-de-la-defense-584bf93bcd70bb41f08e2b2b
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