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Comment définir la Lorraine ?
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Comment définir la Lorraine ?
Sur la base de la tradition. La Lorraine n'a jamais été linguistiquement homogène mais elle a quand même une tradition remontant à la Lotharingie, et je dirais même aux Romains.
Plusieurs choses définissent l'identité de la Lorraine
C'était une petite Suisse, un carrefour des ères linguistiques mais avec un quelque chose en commun quant aux valeurs culturelles et politiques en tant que "pays de l'entre-deux" remontant à l'héritage de Charlemagne. Les Ducs de Lorraine étaient parfaitement conscients de cela, en jouait pour défendre leurs intérêts, et respectaient parfaitement cette pluralité linguistique (Le duché de Lorraine était officiellement bilingue). Ce sont même les Lorrains du Bailliage d'Allemagne du Duché, ceux du secteur de Sierck notamment, qui se sont battus de la façon la plus acharnée au 17e siècle au côté du duc Charles IV pour maintenir la souveraineté du duché de Lorraine face aux ambitions françaises.
Et c'est en tant que petite Suisse, avec cette pluralité, qu'il faut encore aujourd'hui concevoir son identité à mon avis, sinon on ne s'en sort pas. La Lorraine a une identité commune ne serait-ce que par le nom: Nous sommes tous des Lorrains ou Lothringer, cela signifie la même chose. Sous l'Annexion, le terme Mosellan ou Moselländer était peu utilisé, d'autant que la variante allemande, Moselländer, est déjà utilisé par les Allemands du cours inférieur de la Moselle. Chez nous, on se disait Lothringer. Mais quant bien même on se définirait comme Mosellans, cela signifie la même chose que Lorrain/Lothringer. Sylvain Chimello, historien et ancien archiviste de Thionville me l'a un jour expliqué et il l'évoque dans un de ses livres: l'ancien "pagus mosellanus" et le pays lorrain étaient synonyme au Moyen Age.
La Lorraine ne se résume pas au seul duché de Lorraine. Perso, mes racines sont à Sierck, cité des ducs où l'on parlait luxembourgeois, donc là pas de problème, on ne voit aucune contradiction entre l'identité lorraine et le parler luxembourgois. Mais le Luxembourg (un nom récent par rapport à la Lorraine) est aussi issue de la Lorraine. En Belgique le terme de "Lorraine belge" est encore en usage. Tout ça fait partie du pays de l'entre-deux. Il se trouve simplement que le seul souverain a avoir eu l'ambition de revendiquer l'héritage de la l'ancien duché de la Haute-Lotharingie ou Haute-Lorraine (qui outre les territoires du duché de Lorraine comprenait le secteur d'Arlon, Echternach et tout le sud du Luxembourg, tout le pays de Trèves, la Sarre et naturellement ce qui allait devenir les Trois-évêchés), et avoir gardé ce nom, ce sont les Ducs de Lorraine. C'est pourquoi ils voulaient au moins incorporer Metz dans leur duché.
Nous vivons dans un même espace articulé par la Moselle et cet espace commun se voit aussi dans l'héritage culturel matériel. Il y a de très grandes similitudes en architecture rurale par exemple. Mais comme on rase tout, surtout au Luxembourg et dans le pays thionvillois, qu'on méprise tout, qu'on chamboule tout dans les villages, on perdra bientôt ce lien, dont les gens n'ont déjà plus conscience. Perso, j'en ai une grande conscience, car j'ai grandi dans une toute autre région avec une toute autre architecture. Le mépris de l'architecture rurale fait perdre aux gens leurs racines et à notre région son identité.
La Lorraine culturelle se retrouve aussi dans l'héritage culturel immatériel: ex.: la fête de saint Nicolas. Notre espace mosellan fait partie de ce que les universitaires appellent "la dorsale catholique".
Je fréquente beaucoup les milieux lorrains, et un peu les milieux monarchistes français, et je constate que ce sont deux mondes qui s'ignorent bien souvent (pas toujours, ça dépend des individus). C'est dommage, car les deux font partie de notre identité et il faudrait essayer d'articuler tout cela, même si ce n'est pas simple.
C'est au demeurant l'un des grands mérites de Barrès d'avoir été à la fois Français et Lorrain. Mais il me semble qu'à son époque, cela allait de soi.
Au fait, savez-vous que la Vierge qui surplombe la basilique de Notre-Dame de Sion, haut lieu de pèlerinage lorrain sur cette "colline inspirée" chère à Barrès, est la copie conforme de celle de Hayange? C'était un choix délibéré, pour marquer symboliquement l'union entre la Lorraine restée française et la partie annexée. Nos anciens ne se posaient pas la question de savoir si on étaient bien tous Lorrains. C'était évident pour tous.
Aujourd'hui tout est fracturé:
-Fracturés entre les amateurs d'histoire nationale française et d'histoire régionale lorraine. (Du côté du Rassemblement national surtout, c'est lamentable: ils ne connaissent que le roman national, mais c'est la faute de l'Education nationale, incapable de transmettre autre chose que l'histoire jacobine).
-A l'intérieur du monde lorrain, c'est très fracturé également entre ceux qui entretiennent la division à mon avis artificielle entre l'héritage germanique et les francophones du sud qui oublient souvent le caractère bilingue du duché de Lorraine. C'est une division qui n'a pas lieu d'être et qui n'existait pas dans l'esprit des Lorrains d'autrefois, et qui paradoxalement fait surface au moment où les parlers germaniques disparaissent (par la seule faute de la Ripoublique). Mais le souvenir de la famille des Lorraine-Habsbourg et du duché bilingue peut faire le lien entre les deux. Au demeurant les Nancéiens sont malgré tout assez tournés vers l'Europe centrale, précisément en raison de ce caractère de pays d'entre-deux de l'ancien Duché et de l'histoire des Lorraine-Habsbourg.
Les milieux monarchistes français sont de leur côté aussi très fracturés comme vous savez.
Bref, c'est assez désespérant quand on veut réunir les conservateurs et "traditionalistes". Il faudrait davantage se parler. On ne peut faire l'union qu'en adoptant une attitude d'acceptation de la complexité de l'héritage historique sans y voir nécessairement des oppositions insurmontables. En tout cas de mon côté, je vois bien des points communs entre tous ces milieux, sinon je ne me sentirais pas partout à l'aise.
Le catholicisme est le principal liant entre tout ça (enfin, chez ceux qui sont encore catholiques. Certaines associations, notamment certaines défendant le luxembourgeois, en sont très éloignées. Mais toute notre histoire et identité régionale est complètement imprégnée de catholicisme, que ce soit du côté francophone, luxembourgophone, ou du côté du Baillage d'Allemagne). Sans le catholicisme, c'est très difficile de maintenir le lien et les racines.
Je me permets d'associer Florent, Flavi et l'abbé Johann à cet échange important, pour info.
Amicalement
Plusieurs choses définissent l'identité de la Lorraine
C'était une petite Suisse, un carrefour des ères linguistiques mais avec un quelque chose en commun quant aux valeurs culturelles et politiques en tant que "pays de l'entre-deux" remontant à l'héritage de Charlemagne. Les Ducs de Lorraine étaient parfaitement conscients de cela, en jouait pour défendre leurs intérêts, et respectaient parfaitement cette pluralité linguistique (Le duché de Lorraine était officiellement bilingue). Ce sont même les Lorrains du Bailliage d'Allemagne du Duché, ceux du secteur de Sierck notamment, qui se sont battus de la façon la plus acharnée au 17e siècle au côté du duc Charles IV pour maintenir la souveraineté du duché de Lorraine face aux ambitions françaises.
Et c'est en tant que petite Suisse, avec cette pluralité, qu'il faut encore aujourd'hui concevoir son identité à mon avis, sinon on ne s'en sort pas. La Lorraine a une identité commune ne serait-ce que par le nom: Nous sommes tous des Lorrains ou Lothringer, cela signifie la même chose. Sous l'Annexion, le terme Mosellan ou Moselländer était peu utilisé, d'autant que la variante allemande, Moselländer, est déjà utilisé par les Allemands du cours inférieur de la Moselle. Chez nous, on se disait Lothringer. Mais quant bien même on se définirait comme Mosellans, cela signifie la même chose que Lorrain/Lothringer. Sylvain Chimello, historien et ancien archiviste de Thionville me l'a un jour expliqué et il l'évoque dans un de ses livres: l'ancien "pagus mosellanus" et le pays lorrain étaient synonyme au Moyen Age.
La Lorraine ne se résume pas au seul duché de Lorraine. Perso, mes racines sont à Sierck, cité des ducs où l'on parlait luxembourgeois, donc là pas de problème, on ne voit aucune contradiction entre l'identité lorraine et le parler luxembourgois. Mais le Luxembourg (un nom récent par rapport à la Lorraine) est aussi issue de la Lorraine. En Belgique le terme de "Lorraine belge" est encore en usage. Tout ça fait partie du pays de l'entre-deux. Il se trouve simplement que le seul souverain a avoir eu l'ambition de revendiquer l'héritage de la l'ancien duché de la Haute-Lotharingie ou Haute-Lorraine (qui outre les territoires du duché de Lorraine comprenait le secteur d'Arlon, Echternach et tout le sud du Luxembourg, tout le pays de Trèves, la Sarre et naturellement ce qui allait devenir les Trois-évêchés), et avoir gardé ce nom, ce sont les Ducs de Lorraine. C'est pourquoi ils voulaient au moins incorporer Metz dans leur duché.
Nous vivons dans un même espace articulé par la Moselle et cet espace commun se voit aussi dans l'héritage culturel matériel. Il y a de très grandes similitudes en architecture rurale par exemple. Mais comme on rase tout, surtout au Luxembourg et dans le pays thionvillois, qu'on méprise tout, qu'on chamboule tout dans les villages, on perdra bientôt ce lien, dont les gens n'ont déjà plus conscience. Perso, j'en ai une grande conscience, car j'ai grandi dans une toute autre région avec une toute autre architecture. Le mépris de l'architecture rurale fait perdre aux gens leurs racines et à notre région son identité.
La Lorraine culturelle se retrouve aussi dans l'héritage culturel immatériel: ex.: la fête de saint Nicolas. Notre espace mosellan fait partie de ce que les universitaires appellent "la dorsale catholique".
Je fréquente beaucoup les milieux lorrains, et un peu les milieux monarchistes français, et je constate que ce sont deux mondes qui s'ignorent bien souvent (pas toujours, ça dépend des individus). C'est dommage, car les deux font partie de notre identité et il faudrait essayer d'articuler tout cela, même si ce n'est pas simple.
C'est au demeurant l'un des grands mérites de Barrès d'avoir été à la fois Français et Lorrain. Mais il me semble qu'à son époque, cela allait de soi.
Au fait, savez-vous que la Vierge qui surplombe la basilique de Notre-Dame de Sion, haut lieu de pèlerinage lorrain sur cette "colline inspirée" chère à Barrès, est la copie conforme de celle de Hayange? C'était un choix délibéré, pour marquer symboliquement l'union entre la Lorraine restée française et la partie annexée. Nos anciens ne se posaient pas la question de savoir si on étaient bien tous Lorrains. C'était évident pour tous.
Aujourd'hui tout est fracturé:
-Fracturés entre les amateurs d'histoire nationale française et d'histoire régionale lorraine. (Du côté du Rassemblement national surtout, c'est lamentable: ils ne connaissent que le roman national, mais c'est la faute de l'Education nationale, incapable de transmettre autre chose que l'histoire jacobine).
-A l'intérieur du monde lorrain, c'est très fracturé également entre ceux qui entretiennent la division à mon avis artificielle entre l'héritage germanique et les francophones du sud qui oublient souvent le caractère bilingue du duché de Lorraine. C'est une division qui n'a pas lieu d'être et qui n'existait pas dans l'esprit des Lorrains d'autrefois, et qui paradoxalement fait surface au moment où les parlers germaniques disparaissent (par la seule faute de la Ripoublique). Mais le souvenir de la famille des Lorraine-Habsbourg et du duché bilingue peut faire le lien entre les deux. Au demeurant les Nancéiens sont malgré tout assez tournés vers l'Europe centrale, précisément en raison de ce caractère de pays d'entre-deux de l'ancien Duché et de l'histoire des Lorraine-Habsbourg.
Les milieux monarchistes français sont de leur côté aussi très fracturés comme vous savez.
Bref, c'est assez désespérant quand on veut réunir les conservateurs et "traditionalistes". Il faudrait davantage se parler. On ne peut faire l'union qu'en adoptant une attitude d'acceptation de la complexité de l'héritage historique sans y voir nécessairement des oppositions insurmontables. En tout cas de mon côté, je vois bien des points communs entre tous ces milieux, sinon je ne me sentirais pas partout à l'aise.
Le catholicisme est le principal liant entre tout ça (enfin, chez ceux qui sont encore catholiques. Certaines associations, notamment certaines défendant le luxembourgeois, en sont très éloignées. Mais toute notre histoire et identité régionale est complètement imprégnée de catholicisme, que ce soit du côté francophone, luxembourgophone, ou du côté du Baillage d'Allemagne). Sans le catholicisme, c'est très difficile de maintenir le lien et les racines.
Je me permets d'associer Florent, Flavi et l'abbé Johann à cet échange important, pour info.
Amicalement
Charles de Lorraine- Touriste
- Messages : 6
Date d'inscription : 19/04/2015
Re: Comment définir la Lorraine ?
Moi je pense Lorraine et à ma grand mère je pense à la croix des patriarches orthodoxes, la sainte croix.
Plaristes Evariste- Vénérable
- Messages : 25190
Date d'inscription : 04/06/2020
Re: Comment définir la Lorraine ?
Ah c'est vrai qu'il y a des chaudasses en Lorraine ...
Vive la Lorraine !
Vive la Lorraine !
Monsieur Trololo- Vénérable
- Messages : 15509
Date d'inscription : 03/08/2021
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