Extraits de tragédies de Racine

[Paulette]

Dans l’Orient désert quel devint mon ennui !
Je demeurai longtemps errant dans Césarée,
Lieux charmants où mon cœur vous avait adorée.
Je vous redemandais à vos tristes États ;
Je cherchais en pleurant les traces de vos pas.
Mais enfin succombant à ma mélancolie,
Mon désespoir tourna mes pas vers l’Italie.

Bérénice, I, 4

[Georges Baladin]

C'est l'un des rares bouquins que j'ai lu. Il m'a fait aimer la mélodie du français, j'avais 16-17 ans. Je compte le relire un jour. C'est très court une centaine de pages, c'est ça aussi un bon livre. Apres l'histoire c'est un type qui doit choisir entre deux nana, c'est très cul cul, mais bordel que c'est bien léché. Même si tu piges rien, c'est chantant et grisant

[Paulette]

Je n'écoute plus rien, et pour jamais adieu.
Pour jamais! Ah! Seigneur, songez-vous en vous-même
Combien ce mot cruel est affreux quand on aime?
Dans un mois, dans un an, comment souffrirons-nous,
Seigneur, que tant de mers me séparent de vous?
Que le jour recommence et que le jour finisse
Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice,
Sans que de tout le jour je puisse voir Titus?
Mais quelle est mon erreur, et que de soins perdus!
L'ingrat, de mon départ consolé par avance,
Daignera-t-il compter les jours de mon absence?
Ces jours, si longs pour moi, lui sembleront trop courts.

Bérénice, IV, 5

[Paulette]

"Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler,
Je sentis tout mon corps et transir brûler.
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,
D'un sang qu'elle poursuit, tourments inévitables."

Phèdre, Acte I, scène 3

[Paulette]

Ariane, ma sœur ! de quel amour blessée
Vous mourûtes aux bords où vous fûtes laissée !

Phèdre, Acte I, scène 3

[Paulette]

Hermione, seule :

Où suis-je ? Qu'ai-je fait ? Que dois-je faire encore ?
Quel transport me saisit ? Quel chagrin me dévore ?
Errante et sans desseins je cours dans ce palais
Ah ! Ne puis-je savoir si j'aime ou si je hais ?
Le cruel ! De quel oeil m'a t-il congédiée !
Sans pitié, sans douleur au moins étudiée !
L'ai-je vu se troubler et me plaidre un moment ?
En ai-je pu tirer un seul gémissement ?
Muet à mes soupirs, tranquille à mes alarme,
Semblait-il seulement qu'il eût part à mes larmes ?

Andromaque, acte V, scène 1

[Georges Baladin]

J'ai rien lu de plus beau depuis Victor Hugo. Ça se lit tout seul et même si tu ne comprend pas, les sonorités sont magnifiques.

Jeano et Victor se connaissait-il ? Pourquoi Racine n'est pas populaire comme Molière ou Victor ?

[Paulette]

J'ai rien lu de plus beau depuis Victor Hugo. Ça se lit tout seul et même si tu ne comprend pas, les sonorités sont magnifiques.

Jeano et Victor se connaissait-il ? Pourquoi Racine n'est pas populaire comme Molière ou Victor ?
 

Salut, Georges,
Victor Hugo admirait beaucoup Jean Racine, mais il est né 163 ans trop tard pour le connaître "de visu".
Et dans l'écriture de ses pièces de théâtre, Victor a voulu rompre complètement avec la tragédie classique.
Le fait même d'écrire des tragédies, qui mettent en scène des hauts personnages, ça ne vous rend pas très "populaire".
Et la tragédie se termine mal, les gens aiment mieux quand ça finit bien !

[Georges Baladin]

Merci beaucoup pour les infos. Donc dans l'oeuvre de Victor Hugo çà fini bien de manière générale ?
Par exemple "demain dès l'aube" la fin est poignante, même si il n'y a pas de meurtre.

[Paulette]

Merci beaucoup pour les infos. Donc dans l'oeuvre de Victor Hugo çà fini bien de manière générale ?  
Par exemple "demain dès l'aube" la fin est poignante, même si il n'y a pas de meurtre.

Ah oui, c'est vrai, bonne remarque.
En fait, je parlais plutôt des pièces de théâtre : au XVIIe siècle, la tragédie marchait très bien, même le peuple allait les voir, d'ailleurs, Molière à ses débuts d'acteur voulait absolument jouer des tragédies mais il était sifflé.
Mais la tragédie du XVIIe siècle était soumise à des règles très strictes et du coup, au XIXe et au XXe siècle, les gens en ont perdu le goût.
Mais de nos jours, les pièces de théâtre de Victor Hugo ne sont plus non plus trop appréciées.

[Paulette]

Hermione, à Pyrrhus

Je ne t'ai point aimé, cruel? Qu'ai-je donc fait?
J'ai dédaigné pour toi les voeux de tous nos princes ;
Je t'ai cherché moi-même au fond de tes provinces ;
J'y suis encor, malgré tes infidélités,
Et malgré tous mes Grecs honteux de mes bontés.
Je leur ai commandé de cacher mon injure ;
J'attendais en secret le retour d'un parjure ;
J'ai cru que tôt ou tard, à ton dévoir rendu,
Tu me rapporterais un coeur qui m'étais dû.
Je t'aimais inconstant, qu'aurais-je fait fidèle?
Et même en ce moment où ta bouche cruelle
Vient si tranquillement m'annoncer le trépas,
Ingrat, je doute encor si je ne t'aime pas.

Andromaque, acte IV, scène 5

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