France : « Démocratie : état d’urgence »
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Nous voilà, plus tôt que prévu, devant une bifurcation historique. Pour la première fois depuis longtemps, le peuple français doit dire s’il accepte ou non que l’extrême droite prenne légalement la direction d’un gouvernement.
Il se dit parfois que, somme toute, elle ne ferait que continuer en les aggravant les choix antidémocratiques et antisociaux des exécutifs précédents. Il est vrai que ceux-là porteront devant l’histoire la responsabilité écrasante d’avoir accoutumé notre peuple à la régression et non plus au progrès. Mais, en installant l’extrême droite à leur place, nous ferions plus qu’aggraver : nous entérinerions une rupture inédite, l’entrée dans une zone grise, dont nous ne savons pas à quels errements elle pourrait nous mener.
La crise politique que nous vivons nous dit sur le fond que la Ve République est moribonde et qu’il faudra, à plus ou moins brève échéance, dire dans quelle direction il faut collectivement reconstruire. Confier les rênes à l’extrême droite, c’est permettre que la refondation à venir s’écarte radicalement de la tradition constitutionnelle républicaine, quelles qu’aient été les formes de cette tradition. Une République, c’est un ancrage dans l’histoire ; plus que des règles écrites, c’est une méthode et un concentré de valeurs. De celles que nous concocterait l’extrême droite, qui peut dire vers quelle régression elle nous porterait et quand il serait possible d’en sortir ?
En outre, confier les rênes gouvernementales au Rassemblement national (RN), ce n’est pas simplement accepter l’arrivée au pouvoir d’une formation située dans la partie la plus à droite de l’échiquier politique français et européen. Dans une période de très grand désarroi des consciences, c’est donner les clés de l’État à une force qui s’appuie sur une redoutable cohérence de projet. Son premier versant repose sur la conviction que, dans un monde instable et dangereux, l’objectif essentiel est la protection, garantie par l’étanchéité des frontières nationales et l’intransigeance de l’État. Le second versant est plus « social » : dans des sociétés aux ressources limitées, nous dit-on, il faut écarter tous ceux qui ne méritent pas d’être associés au partage, la petite couche des parasites de « l’élite » et surtout la masse des « assistés », en premier lieu les immigrés.
Le projet du RN touche en même temps au social, au politique et au symbolique. Il parle à la raison et au cœur, en reliant dans un tout l’obsession de la protection, le fantasme de la clôture, la tentation de l’exclusion et la peur identitaire de l’altérité. Un projet total, assorti d’un risque totalitaire… Le vote législatif sera pour nous, en ce sens, une sorte de plébiscite pour dire que les citoyennes et citoyens de ce pays n’en veulent en aucun cas.
L’histoire ignore la fatalité et c’est une chance inestimable que la gauche se présente unie pour stopper le rouleau compresseur en cours. Bien sûr, nous devrons ensuite nous demander pourquoi cette union est si rare et si peu durable. Nous nous demanderons pourquoi la gauche a désespéré les catégories populaires, pourquoi les dynamiques sociales et politiques se sont à ce point séparées, pourquoi les institutions et les partis ont une si piètre image.
Dans l’immédiat, l’urgence est au sursaut démocratique, autour d’un rassemblement qui se doit d’être absolument sans faille, sans chef d’orchestre : pluriel et partagé. À nous tou·te·s de le faire vivre.
Roger Martelli, historien
Nous voilà, plus tôt que prévu, devant une bifurcation historique. Pour la première fois depuis longtemps, le peuple français doit dire s’il accepte ou non que l’extrême droite prenne légalement la direction d’un gouvernement.
Il se dit parfois que, somme toute, elle ne ferait que continuer en les aggravant les choix antidémocratiques et antisociaux des exécutifs précédents. Il est vrai que ceux-là porteront devant l’histoire la responsabilité écrasante d’avoir accoutumé notre peuple à la régression et non plus au progrès. Mais, en installant l’extrême droite à leur place, nous ferions plus qu’aggraver : nous entérinerions une rupture inédite, l’entrée dans une zone grise, dont nous ne savons pas à quels errements elle pourrait nous mener.
La crise politique que nous vivons nous dit sur le fond que la Ve République est moribonde et qu’il faudra, à plus ou moins brève échéance, dire dans quelle direction il faut collectivement reconstruire. Confier les rênes à l’extrême droite, c’est permettre que la refondation à venir s’écarte radicalement de la tradition constitutionnelle républicaine, quelles qu’aient été les formes de cette tradition. Une République, c’est un ancrage dans l’histoire ; plus que des règles écrites, c’est une méthode et un concentré de valeurs. De celles que nous concocterait l’extrême droite, qui peut dire vers quelle régression elle nous porterait et quand il serait possible d’en sortir ?
En outre, confier les rênes gouvernementales au Rassemblement national (RN), ce n’est pas simplement accepter l’arrivée au pouvoir d’une formation située dans la partie la plus à droite de l’échiquier politique français et européen. Dans une période de très grand désarroi des consciences, c’est donner les clés de l’État à une force qui s’appuie sur une redoutable cohérence de projet. Son premier versant repose sur la conviction que, dans un monde instable et dangereux, l’objectif essentiel est la protection, garantie par l’étanchéité des frontières nationales et l’intransigeance de l’État. Le second versant est plus « social » : dans des sociétés aux ressources limitées, nous dit-on, il faut écarter tous ceux qui ne méritent pas d’être associés au partage, la petite couche des parasites de « l’élite » et surtout la masse des « assistés », en premier lieu les immigrés.
Le projet du RN touche en même temps au social, au politique et au symbolique. Il parle à la raison et au cœur, en reliant dans un tout l’obsession de la protection, le fantasme de la clôture, la tentation de l’exclusion et la peur identitaire de l’altérité. Un projet total, assorti d’un risque totalitaire… Le vote législatif sera pour nous, en ce sens, une sorte de plébiscite pour dire que les citoyennes et citoyens de ce pays n’en veulent en aucun cas.
L’histoire ignore la fatalité et c’est une chance inestimable que la gauche se présente unie pour stopper le rouleau compresseur en cours. Bien sûr, nous devrons ensuite nous demander pourquoi cette union est si rare et si peu durable. Nous nous demanderons pourquoi la gauche a désespéré les catégories populaires, pourquoi les dynamiques sociales et politiques se sont à ce point séparées, pourquoi les institutions et les partis ont une si piètre image.
Dans l’immédiat, l’urgence est au sursaut démocratique, autour d’un rassemblement qui se doit d’être absolument sans faille, sans chef d’orchestre : pluriel et partagé. À nous tou·te·s de le faire vivre.
Roger Martelli, historien
Vladimir de Volog- Vénérable
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